Pêche de l’émissole au crabe vert

22/02/2021

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Un petit briefing avant de prendre la mer

Pour cette sortie nous nous sommes donnés rendez-vous au port du Moulin Blanc à Brest où est amarré mon bateau. Un léger crachin nous accueille mais il est loin de nous décourager.

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Nous prenons quelques minutes pour le briefing de départ. Le trajet dure environ 45 minutes sur une mer calme. Malgré un ciel chargé, le paysage est magnifique. Une fois arrivé sur zone je mouille l’ancre et nous nous installons à l’arrière pour commencer la pêche. Je commence par décrire l’endroit où nous nous trouvons ainsi que l’espèce recherchée et ses mœurs.

Pascal et Lydie comprennent alors pourquoi j’ai choisi cet endroit. En effet ce requin de fond recherche la sécurité de la profondeur de l’estuaire et l’abondance de coquillages et de crustacés. En raison du régime alimentaire des émissoles et de sa forte présence sur la zone de pêche, j’ai sélectionné le crabe vert entier comme appât.

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Nous passons ensuite à la description et au montage des lignes. Le bas de ligne est très simple :

● Un hameçon circle de 3/0 qui a pour particularité de ne se planter que dans la commissure des lèvres et de ne pas blesser le poisson. Cette taille est également adaptée aux appâts utilisés.

● Un bas de ligne en fluorocarbone en 50/100 de 1.5m ; ce diamètre et cette longueur ont pour but d’éviter la casse car la peau extrêmement rugueuse de l’émissole a tendance à couper les bas de ligne. Ainsi, la longeur d’1.5m de bas de ligne évitera tout contact avec le poisson.

● Un plomb montre de 120gr pris directement sur l’agrafe. Le fond sablo-vaseux ne présente pas d’aspérité mais fait rouler les plombs. Le plomb montre, une fois posé sur le fond ne roule pas et permet aux lignes de ne pas dériver dans le courant de l’estuaire. Le fond, qui peut être considéré ici comme « propre », ne nécessite ainsi pas l’usage d’un cassant.

Le crabe vert comme appât

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L’eschage du crabe vert doit se faire avec précaution. L’hameçon passe dans la carapace sans pour autant la casser, de façon à assurer la meilleure tenue possible du crabe. Je veille également à bien dégager la pointe de l’hameçon afin de faciliter le ferrage

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Nous commençons avec les cannes PROX PUNCHY, 2.33m, puissance 15 – 60gr avec un moulinet TICA TEMPEST 4000. Ce matériel robuste va nous permettre de combattre nos premiers poissons : cet ensemble a pour vocation de pardonner les erreurs. Les lignes sont disposées en éventail à des distances différentes, ce qui nous permet d’éviter les emmêlements au départ du poisson et pendant les combats. Une règle d’or ici, ne jamais disposer plus de cannes que de pêcheurs sur le bateau ! Les départs multiples sont très fréquents et il est alors impossible de gérer tous les combats simultanément.

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Après une dizaine de minutes la canne du milieu commence à s’agiter. Pas de précipitation, il faut attendre que le poisson engame bien l’appât.

À force de les pêcher, j’ai pu constater que les émissoles ont tendance à prendre leur temps avant de se décider. D’abord elles commencent par broyer le crabe pour ensuite l’avaler. Il faut donc attendre d’avoir un vrai départ de la ligne. Quelques instants plus tard la canne se plie en deux, Lydie s’empare de la canne et applique un ferrage puissant. Le poisson est pris et le combat commence.

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Pendant la lutte je reste à ses côtés pour la conseiller. Elle a tendance à trop monter sa canne, à trop la baisser durant le pompage et surtout à descendre trop vite, ce qui a pour effet de détendre la ligne. On veille donc à ne pas laisser de mou dans la ligne, afin de pomper correctement le poisson. On garde un angle de 30° minimum et de 90° maximum entre la canne et le fil… Le combat se fait en deux phases : au début le poisson est juste lourd, il se laisse remonter en pesant de tout son poids. Une fois que le poisson voit le bateau, les choses changent du tout au tout : il commence à faire des grands rushs. Cette fois-ci c’est au frein du moulinet de jouer. Il devra être réglé de façon à brider le poisson sans pour autant risquer de casser la ligne.

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Après quelques allers-retours entre le fond et la surface, l’émissolle finit par se rendre. Il faudra alors la faire entrer dans l’épuisette, et dès que c’est fait on ouvre le pick-up du moulinet et on dégrafe rapidement le bas de ligne. À cet instant un autre rodéo commence : l’émissole donne de violents coups de queue qui peuvent infliger des brûlures (en raison de sa peau rugueuse) aux pêcheurs imprudents !

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Nous avons à peine le temps de faire un cliché et de remettre le poisson à l’eau que la ligne sur bâbord commence déjà à partir. C’est au tour de Pascal de prendre la canne et pour lui le problème est différent.

Il a tendance à treuiller le poisson et à trop forcer sur le moulinet. Je l’oblige donc à jouer uniquement avec le nerf de la canne et à ne mouliner que pour récupérer son fil. Le combat vient tout juste de commencer et le frein crisse maintenant sur la troisième canne. Chacun va devoir combattre sa prise de son côté ! Les deux poissons sont mis au sec à quelques minutes d’intervalle, ce qui nous permet de faire une belle photo d’un doublé d’émissoles.

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Après quelques poissons supplémentaires faits avec ces cannes, nous changeons de programme : on passe sur du matériel casting (SAKURAUO, 1.83m, puissance 40-150 gr avec moulinet TICA KC51). Ce sera d’ailleurs une découverte pour notre couple qui n’a jamais pêché en casting et les émissoles ne tarderont pas à mordre.

Ces cannes conçues pour la pêche au tenya nécessitent un ferrage bien plus appuyé et leur taille réduite demande un pompage plus rapide. Pascal et Lydie apprécient particulièrement la finesse et la sensibilité de ces cannes qui leur font ressentir les mouvements du poisson comme jamais. La flexibilité de ce genre de matériel les impressionne, notamment le frein silencieux des moulinets casting.

Au début du combat ils sont un peu déstabilisés mais ils apprennent vite à se fier aux nouvelles sensations plus qu’au bruit afin de savoir quand mouliner ou pas.

Moins de puissance pour plus de sensations !

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Acte 3 ! On descend encore en puissance (Canne PROX SPICY, 2.10m puissance 7-35 gr avec moulinet TICA FLASH CAST 4000) et les choses sérieuses commencent !

La canne se comporte bien et nos deux élèves combattent tour à tour (au vu du nombre de touches, le nombre de cannes a été limité à deux). La durée des combats s’allonge et les leçons apprises précédemment portent leurs fruits. Les combats se font plus en douceur et les apprentis montrent moins de signes d’impatience lors des rushs. Les cannes ne forment plus d’angles improbables et le moulinet ne sert plus que de réserve de fil. Une fois les poissons mis au sec, je leur annonce qu’on va pouvoir encore passer à la vitesse supérieure !

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Le bouquet final se fera avec une PROX SCRAPPY de 1.98m, puissance 3.5-14 gr, équipée d’un moulinet TICA FLASH CAST 2500. La canne n’a clairement pas été conçue pour cette utilisation… mais c’est tellement drôle ! Dès la touche on sent la différence, la canne est cintrée et le treuillage impossible. La canne sera alors poussée dans ses derniers retranchements.

Pascal et Lydie devront, en plus, combattre simultanément car les émissoles ont mordu à quelques secondes d’intervalle. Pour le guide la situation est compliquée car il faut conseiller deux personnes à la fois et ce coup-ci l’erreur ne pardonnera pas. Mais ils se débrouillent très bien, ils prennent leur temps, les ensembles moulinets-cannes font le job et les freins sont réglés aux petits oignons.

La difficulté survient dans les dernières minutes du combat, les émissoles partent sous le bateau et nous sommes obligés de mettre le scion dans l’eau pour éviter la casse. Après quelques secondes à prier pour que les fils ne se croisent pas, les poissons reviennent du bon côté et nous pouvons les épuiser l’un après l’autre.

Espèce visée : l’émissole tachetée

NOM LATIN : Mustelus asterias

FAMILLE : Triakidae

PHYLUM : Chordata

CLASSE : Chondrichthyes

Il s’agit d’un requin gris avec des taches claires sur le dos. L’émissole tachetée vit dans la zone côtière, entre 5 et 200 mètres de profondeur, sur des fonds constitués de graviers ou de sable.

Jeune, elle se nourrit principalement de crustacés. Adulte, elle passera aux poissons. Elle mesure entre 100 et 150 cm et est commercialisée en poissonnerie sous le nom générique de saumonette.

Les émissoles ont un corps plus flexible que la plupart des requins et peuvent effectuer des virages très serrés. Elle dispose de dents en mosaïque émoussées. Par ailleurs, l’émissole tachetée peut vivre en petits groupes, parfois associés à d’autres requins tels que les requins hâ et les émissoles lisses.

L’émissole tachetée est vivipare aplacentaire, ce qui signifie que le foetus se développe sur le vitellus de l’œuf. La gestation dure entre 11 et 13 mois. Elle peut donner naissance à une vingtaine de progénitures. Il y a une forte densité de femelles dans la rade de Brest, principalement dans l’estuaire de l’Aulne où elle est présente de juin à septembre.


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